dimanche 25 novembre 2012

Maurras entre Shakespeare, Baudelaire et Edgar Poe - Conférence de Jean François Mattei

Ce compte rendu est le premier d'un cycle de conférences tenues lors du colloque organisé par l'Action française le 27 octobre 2012 pour le soixantième anniversaire de la mort de Charles Maurras... D'autres suivront, mais on ne trouvera pas toutes les conférences car notre intention n'est pas de rapporter intégralement le colloque, mais seulement les interventions que nous avons -tout à fait subjectivement - trouvé les plus originales. A toutes fins utiles, précisons que, si nous nous efforçons de rapporter fidèlement ces conférences, toute erreur ou imprécision peut nous être imputée ; et que par ailleurs nous ne nous interdisons pas certaines libertés pour rendre plus intelligibles des exposés donnés dans un temps très limité.
 
 
L'orateur énonce la thèse selon laquelle la politique se résume pour Maurras à une «universelle analogie», ce qu'il va démontrer. Mallarmé, lui, parlait du «démon de l'analogie». Les démons, daïmon, au sens grec, sont des esprits qui font le lien entre les dieux et les mortels et qui inspirent les hommes. L'analogie, est désignée aussi (pour employer le français) par le terme de correspondance. Dans la poésie de Baudelaire, c'est ce qui met en contact la Terre et le Ciel. L'étymologie grecque ana-logos traduit un mouvement d'ascension de la pensée. Ainsi, l'analogie est verticale et toujours inégalitaire. C'est la clef de la pensée hiérarchique de Maurras. Il est intéressant de noter qu'à l'instar des poètes, les scientifiques utilisent un jeu d'images (par exemple l'image du Big Bang) ; et de même les philosophes.

jeudi 22 novembre 2012

« Défendre l’héritage conciliaire »


On peut trouver, sur le site de l’hebdomadaire chrétien et humaniste La Vie, de « libres propos[1] » d’Aimé Savard, « journaliste chrétien », où celui-ci s’emploie à présenter à ses lecteurs Guy Aurenche, président du CCFD, l’un de ses interlocuteurs dans un ouvrage qu’il a récemment fait paraître, Le pari de la fraternité. Voici ce qu’écrit à propos de M. Aurenche notre journaliste chrétien :
Il a vécu Vatican II, « comme un événement de renouvellement et non pas comme la bagarre d'un clan contre un autre clan, encore moins comme une victoire sur des passéistes ou des intégristes. Ce concile représentait une grande allégresse d'ouverture, un immense courant d'air frais, une aération spirituelle». S'il défend l'héritage conciliaire à l'encontre de ceux qui, aujourd'hui, le contestent ou le relativisent, Guy le fait de manière positive : «Loin d'être aigris, je crois que nous devons continuer à porter l'esprit du concile et approfondir la question du sens des grandes mutations que nous vivons, et des lumières que la tradition de l'Eglise et les grands textes fondateurs peuvent nous inspirer pour les comprendre.»
C’est donc comme un exemplaire défenseur du dernier concile qu’est présenté le président du CCFD, plus précisément, comme un défenseur « positif » de l’ « héritage conciliaire ». Il s’agit bel et bien de « continuer à porter l’esprit du concile ». Ces mots ayant au premier abord un sens assez vague, il convient certainement, afin de mieux comprendre la signification que l’on doit leur prêter, de se reporter à une récente contribution positive de M. Aurenche à la défense de l’héritage conciliaire, plus exactement à une tribune que le Groupe Paroles a fait paraître dans La Croix en mars 2011, Guy Aurenche figurant parmi les signataires, sous le titre évocateur « Le christianisme doit retrouver le chemin de l’incarnation »[2].


vendredi 16 novembre 2012

Raffaele MELLACE, Johann Adolf Hasse, L’Epos, Palerme, 2004, 517 pages

S’il a déjà longuement été question de Johann Adolf Hasse sur ce blogue, il convenait certainement d’appuyer ces diverses considérations sur le principal ouvrage publié sur la vie et l’œuvre du Saxon. Auteur d’une thèse sur les mises en musique de l’Achille in Sciro de Métastase par Caldara, Leo et Hasse, professeur d’histoire de la musique à l’université catholique de Milan et à l’Université du Piémont Oriental,  collaborateur de la revue Amadeus, Raffaele Mellace a en effet consacré à ce compositeur un bel ouvrage qui mérite d’être signalé à tous ceux qui s’intéressent à cette figure essentielle du XVIIIe siècle musical. L’auteur ne cache pas son but : il s’agit de remédier à l’oubli dans lequel est tombée la musique de Hasse au cours des XIXe et XXe siècles, victime du triomphe de la bourgeoisie dans l’Europe postrévolutionnaire et de la disparition des institutions courtisanes ou ecclésiastiques où avait vu le jour l’œuvre du compositeur, ainsi que de la musicologie nationaliste et de l’idéal romantique de la musique absolue (p. 19). Hasse, représentant par excellence, tant par sa vie que par sa musique, de la sociabilité du milieu du XVIIIe siècle (p. 21) et d’une époque qu’une musicologie aux vues souvent téléologique tend à considérer comme une simple transition entre le baroque tardif de Bach et de Haendel et le classicisme de Haydn et de Mozart (p. 18), a été ainsi frappé par une véritable « damnatio memoriae » (p. 21). Mellace vise donc non tant à faire œuvre de chercheur ou d’érudit qu’à constituer une synthèse des divers travaux publiés sur Hasse et sa musique en vue de les faire connaître et d’attirer sur eux l’attention des mélomanes.



samedi 3 novembre 2012

Dominique AVON et Philippe ROCHER, Les jésuites et la société française (XIXe-XXe siècles), Editions Privat, Toulouse, 2001, 288 pages

Comment les jésuites, champions de l’intransigeance catholique au XIXe siècle, en sont-ils venus, dans la seconde moitié du XXe siècle, à se faire les promoteurs d’un « nouvel humanisme » qui va jusqu’à mettre à distance le christianisme et l’autorité de l’Eglise ? C’est à cette question que Les jésuites et la société française (XIXe-XXe siècles), publié aux éditions Privat en 2001 par Dominique Avon, maître de conférence à l’université Paul-Valéry de Montpellier et auteur d’une thèse sur le P. Doncœur, et Philippe Rocher, auteur d’articles sur l’histoire des jésuites en France et au Québec à l’époque contemporaine, peut donner quelques éléments de réponse. Supprimée en France dès 1764 et universellement en 1773, victime des assauts des Lumières comme des jansénistes, la Société de Jésus est rétablie en 1814, s’affirme aussitôt comme le fer de lance de la reconquête catholique de la société française et occupe donc une place singulière dans les rapports qu’entretient l’Eglise avec le monde.